Nous avions laissé François Jean-Baptiste Grosvalet et les
habitants de Limay devant l’affiche annonçant la mobilisation générale ; la
population est stupéfaite car elle vient de prendre conscience que chacun est
concerné et à plus d’un titre, regardez le schéma suivant, tous les hommes dont
nous avons parlé plus haut et qui gravitent autour de François Jean-Baptiste
sont mobilisés, le neveu de son beau-père, Victor Edmond Moussard qui sont considérés comme cousins, ses deux beaux-frères, Paul Prévost et Albert
Duvivier et le beau-frère de ce dernier, Georges Pinard et il y a même Emile
Prunet et ses deux frères Eugène et Paul Albert qui mériteraient une étude
particulière.
Comme on peut déjà le constater sur ce tableau sur les cinq
jeunes hommes de la famille Grosvalet et alliés, trois n’en reviendront pas,
François Jean-Baptiste, comme nous le savons déjà mais également son beau-frère
Albert Julien Toussaint Duvivier dont le nom est également gravé sur le monument aux morts de
Limay ainsi que Victor Edmond Moussard.
Je me sens obligée de vous parler de ces hommes, parce qu'ils le méritent et aussi parce qu'ils ont
fait partie de la vie de François Jean-Baptiste Grosvalet ; voici donc quelques
mots au sujet de Victor Edmond Moussard, surtout que les deux hommes, à n’en
pas douter, se considéraient comme cousins.
Caporal depuis le 07 octobre 1908, Victor Edmond Moussard
était réserviste de l’active lors de la mobilisation générale, il a été affecté
logiquement à la 24e section de C.O.A. (Commis et Ouvriers d’Administration) à Versailles
puisqu’il avait fait son service comme C.O.A. pourtant, il passe au 1er
de Zouaves le 30 juin 1916 et va y rester jusqu’à ce que nous le rejoignons
dans la Meuse, à Chattancourt, nom qui est gravé pour toujours dans nos
mémoires. Nous sommes le 20 octobre 1917, après les affrontements de la veille,
la matinée est particulièrement calme, l’après-midi se déroule sans incident…
vers 21 heures une patrouille du 35e d’Infanterie, régiment voisin à
l’ouest, se heurte, juste en face des lignes du 1er de Zouaves à une
patrouille allemande… l’aspirant Hitier avec une dizaine de Zouaves se portent
au secours du 35e… 22 heures, une patrouille commandée par le
sous-lieutenant Mollet reconnaît les abords d’une batterie allemande abandonnée
et n’y rencontre rien à signaler… Mais
voilà que, brusquement, violemment, tous se tournent vers le quartier de droite
où une grande activité avait été déployée toute la journée pour réparer les
brèches faites par le bombardement de la veille… il est 0 h 15 et un méchant
tir vient d’être déclenché, encadrant complètement le sous-lieutenant Billoque
qui se trouvait au petit poste de la barricade du grand boyau conduisant vers
Forges… des Allemands, une bonne soixantaine, surgissement brusquement,
encerclent le petit groupe de Zouaves qui se défendent tant qu’ils réussissent
à passer à travers l’ennemi… le sous-lieutenant Billoque se bat comme un lion…
il est blessé à bout portant par une balle de revolver… la section qui se
trouve à proximité se jette dans la bataille et, superbement conduite par le
sous-lieutenant Massenet, débloque la situation… L’ennemi s’enfuit laissant
plusieurs cadavres et quatre prisonniers dont seul un, blessé cependant, est en
état d’être interrogé, les autres vont bientôt succomber… Il ressort du récit
du prisonnier que c’est une troupe d’élite qui avait préparé et exécuté ce coup
de main qui a avorté grâce à la vigilance, l’énergie et le superbe courage des
Zouaves… dont quatre sont tués et trois blessés et il faut déplorer deux
disparus et parmi les tués de ce jour, le caporal Moussard, notre Victor
Edmond…
Que reste-t-il aujourd’hui du
caporal Edmond Moussard, cultivateur à Follainville dans les Yvelines où il
était né le 22 septembre 1886 de Louis Edmond et de Marie Clotilde Anastasie
Masson ? Une description physique, il mesurait 1,68 m, avait les cheveux
et les sourcils bruns, les yeux gris, son nez et sa bouche étaient moyens, il
avait le front ordinaire mais avec une bosse, son menton était rond mais le
visage ovale, il savait lire et écrire… peut-être quelqu’un, un descendant,
possède-t-il une photo de lui, des objets ou des documents lui ayant appartenu… car il est probable qu’il se soit marié le 25 novembre 1913 à
Follainville avec Madeleine Louise Irma Desportes et que de leur union soit né,
le 12 février 1914, toujours à Follainville, Maurice Julien Edmond Moussard qui
sera adopté par la Nation.
Monument - Follainville |
La
transcription de son décès survenu le 21 octobre 1917 a été faite le 2 décembre
1917 dans les registres de Follainville. Le nom du caporal Moussard est écrit
pour toujours dans l’historique du 1er régiment de
marche de Zouaves
dans la grande guerre, sur le monument aux morts de Follainville et sur la
plaque commémorative de l’église Saint-Martin.
Je ne pourrai
jamais vous dire si François Jean-Baptiste a eu connaissance du décès de son
cousin mais il est possible que oui car la transcription a été faite assez
rapidement après le décès de Victor Edmond Moussard, la famille restée à
Follainville l’a donc su à ce moment, elle a du prévenir les autres membres
vivant à Limay… mais on ne saura jamais si quelqu’un a écrit la mauvaise
nouvelle à François Jean-Baptiste… Une chose est sûre, il ne saura jamais que
Albert Julien Toussaint Duvivier, son beau-frère, est Mort pour la France…
voici quelques mots à son sujet.
Albert Duvivier
est châtain foncé et a les sourcils de la même couleur, il a les yeux marrons,
son front est haut, son nez et sa bouche sont moyens et il a le menton rond et
son visage est plein, il a le teint coloré et de grandes oreilles ; il
mesure 1 m 71 mais il est dit sur sa fiche matricule qu’il ne saurait que lire
et écrire… travaillant chez un architecte, je l’imagine bien savoir aussi au
moins compter…
En 1909
lorsqu’il avait effectué son service militaire, il avait été incorporé au 3e
de Zouaves et avait fait la campagne d’Algérie du 07 octobre 1909, jour de son
incorporation, jusqu’au 22 avril 1911 puis il a effectué des opérations dans la
région de Casablanca au Maroc du 23 avril 1911 jusqu’au 28 septembre suivant,
date à laquelle il a été envoyé dans la disponibilité. A la mobilisation
générale, il est logiquement dirigé, dès le 04 août 1914, au 4e
Régiment de Zouaves mais le 19 février 1915, il passe au 12e
Régiment d’Artillerie de Campagne (R.A.C). A une date indéterminée, il fait une
très lourde chute sur la face qui lui occasionne une plaie au front, une autre
à la lèvre supérieure et surtout la fracture de trois dents. Il est blessé par
balle à l’avant bras gauche le 05 novembre 1914 au Bois de Zonnebecke proche du
village de Saint-Eloi dans la région d’Ypres. Je quitte Albert Julien Toussaint
Duvivier car le sujet n’est pas ici de détailler toutes les batailles
auxquelles il a pris part mais je rejoins le 12e RAC dès la deuxième
moitié du mois de juillet 1918 où il vient de subir le choc des terribles
affrontements du 15 juillet en Champagne : « … il n’est relevé que
le 08 septembre… mais le repos n’est pas de longue durée. La IVe armée appelle
le 21e corps en face des formidables organisations du mont Muret et
de Somme-Py [Importantes positions puissamment fortifiées par les Allemands] Le 19 septembre, le 12e
bivouaque avec des
masses prodigieuses d’artillerie de tous les calibres dans les bois de
Saint-Rémy, à 6 km des lignes ; l’activité de cet immense camp, où 15 000
artilleurs et autant de chevaux veulent vivre cachés, est nulle pendant le
jour ; elle devient formidable pendant la nuit où, par centaines de
caissons, chaque régiment monte, en vue du grand coup, des munitions sur des
emplacements simplement jalonnés. Le 24, les positions sont armées. Le 25,
alors qu’aucun coup de canon n’a révélé à l’ennemi une pareille concentration
de moyens, l’ordre d’attaquer est donné. L’armée franco-américaine, sur un
front de 70 km, de la Suippe à la Meuse,
bondit le 26 à 5 h 25, après une
préparation d’artillerie de 6 heures et demie et ce jour, l’ennemi complètement
surpris, attaqué par une infanterie plus mordante que jamais et toujours confiante
dans son artillerie, recule… L’allant du 12e ne le cède en rien à
celui de l’infanterie… Les batteries, superbement, s’engagent immédiatement,
talonnent l’ennemi au mépris des feux de flanc des mitrailleuses, n’attendent
même pas que l’aménagement des pistes soit terminé, manœuvrent sur un terrain
qui semble infranchissable, poussées uniquement par le souci d’appuyer pas à
pas les assaillants et de leur permettre d’exploiter leur succès. Les munitions
affluent, le personnel des échelons de ravitaillement animé d’une pareille
ardeur veut prendre sa part de la défaite infligée à l’adversaire et colle aux
batteries. Le mot d’ordre est « en avant » ; qu’importent alors
la mitraille et les gaz et les « fantomas » hardis qui mitraillent à
200 m d’altitude. Le succès enflamme tout le personnel… » [Extrait de l’historique
du 12e RAC]
Fourragère Croix de Guerre - 1917 au 12e RA |
C’est terminé,
le canonnier servant du 12e RAC, 5e batterie, Albert Julien Toussaint Duvivier ne
connaîtra plus jamais joie ou peine, il est Mort pour la France, tué à l’ennemi,
le 27 septembre 1918 au combat du mont Muret dans la Marne ; la
transcription de son décès est faite le 28 février 1920 à Limay.
Au début de ce
chapitre, nous avions assisté à son mariage en 1913 à Limay dans les Yvelines
mais nous avions également constaté que Albert Julien Toussaint Duvivier
habitait à Paris, lors de son rappel sous notre drapeau, il habitait dans le 18e
arrondissement de la capitale, dans la rue d’Orchampt, (juste en face de la
maison où la chanteuse Dalida trouvera la mort en 1987) mais lorsqu’il est parti
affronter son destin, il n’a pas laissé qu’une jeune femme car une petite fille
est née le 26 juillet 1914 dans le 18e arrondissement parisien. Sa
jeune épouse s’est donc retrouvée isolée dans la capitale qu’elle ne connaît
pas, elle n’a sans doute pas eu le temps de se faire des amis sur lesquels
compter de plus, tous les Parisiens ont leurs propres problèmes et beaucoup de civils ont quitté la capitale, comme tous, elle subit les restrictions et
doit faire face à des difficultés sans nom et elle doit subvenir aux besoins de
ce bébé né au mauvais moment alors, elle opte pour la seule solution possible,
elle retourne auprès de ses parents, de son frère et de leur sœur… à Limay.
C’est ainsi que le nom des deux beaux-frères se retrouvent sur le même monument
aux morts, celui de Limay. Bien entendu, on retrouve également le nom d’Albert
Duvivier dans l’historique du 12e Régiment d’Artillerie de Campagne.
Le beau-frère
d’Albert Duvivier, Georges Pinard, bénéficie d’une affectation spéciale
puisqu’il est dessinateur aux chemins de fer, et que les chemins de fer sont
stratégiques, il est donc maintenu dans son emploi de temps de paix, c’est
d’ailleurs pour le même motif qu’il avait été dispensé des périodes d’exercices
réglementaires.
Usine Schneider - Le Havre |
Puisque j’ai
parlé des autres compagnons de François Jean-Baptiste, je ne peux pas ne pas
dire quelques mots de son autre beau-frère, Paul Prévost, le mari de Virginie
Grosvalet. A la mobilisation générale, comme tous, il reçoit une affectation
qui, pour lui, sera le 18e Régiment Territorial d’Infanterie mais il
est envoyé devant la commission spéciale de réforme d’Evreux car Paul Prévost a
une particularité… il souffre d’obésité… il est donc finalement classé au service
auxiliaire et est détaché aux usines Schneider au Havre le 29 janvier 1915 tout
en dépendant du 129e régiment d’Infanterie. Il faut dire que l’armée
avait besoin de bras pour faire tourner les usines d’armement car Schneider,
comme la majorité des usines de l’époque, produisait alors des munitions et des
armes. Il restera dans cette situation jusqu’au 30 juin 1917 puis, son état de
santé s’étant sans doute amélioré, il est affecté au 129e R.I. à
partir du 1er juillet 1917.
Il me faut maintenant aborder la vie du soldat François Jean-Baptiste
Grosvalet qui, vous allez le voir, est bien différente de celle de ses
beaux-frères et cousin, en suivant son
parcours, nous allons découvrir une autre facette de la guerre. A la
mobilisation générale, il est, comme tous les autres, rappelé et il arrive au
corps le 11 août 1914 et part aux armées le 09 septembre suivant… seulement
voilà, il tombe malade… il est évacué le 1er octobre 1914, il doit
l’être sur un hôpital mais ce n’est pas précisé, on le soigne et, le 21 octobre
suivant, il rentre au dépôt où il
séjourne jusqu’au 25 novembre, date à laquelle on l’envoie en renfort… le voici
donc de nouveau au front mais… le 19 février 1915, très malade, il est évacué,
on le soigne longtemps et on lui prescrit du repos qu’il doit prendre au dépôt
qu’il regagne le 11 août suivant… cette fois, on ne le renvoie pas au front
mais devant la 3e commission de la Seine qui, le 24 septembre 1915,
le réforme n° 2 pour adénopathie trachéo-bronchique mais on a bon espoir de le
voir guérir puisqu’il n’est que temporairement réformé. Il se présente, le 27
décembre de la même année, devant une commission spéciale de réforme à
Versailles qui juge son état incompatible avec une vie au front et qui, sans
doute parce qu’il va mieux que la dernière fois mais en reconnaissant cependant
qu’il souffre toujours de la même maladie, décide de le classer au service
auxiliaire. Il est affecté à l’école d’aviation de Juvisy le 09 février 1916 et
se présente le 06 mars suivant devant une nouvelle commission spéciale de
réforme de Versailles, il est maintenu dans le service auxiliaire ; le 27
mars 1917, il est affecté à la 2e Compagnie d’Ouvriers puis, le 10
octobre 1917, à le 24e section de la même compagnie. Mais ce qui a
échappé à l’armée, c’est l’état de santé de François Jean-Baptiste Grosvalet…
mal soigné… l’organisme affaibli par cette adénopathie
trachéo-bronchique diagnostiquée dès octobre 1914… on ne saura jamais la vérité et ce n’est pas très important de la connaître… en tous les cas, cet été 1918, il est encore malade et il est admis à l’hôpital temporaire n° 176… à Limay…
trachéo-bronchique diagnostiquée dès octobre 1914… on ne saura jamais la vérité et ce n’est pas très important de la connaître… en tous les cas, cet été 1918, il est encore malade et il est admis à l’hôpital temporaire n° 176… à Limay…
A suivre ici : François Jean-Baptiste Grovalet, la fin
Catherine Livet
François Jean-Baptiste Grosvalet est à retrouver dans le tome 1 de
Livre 16 x 24 cm - Dos carré collé - 337 pages - Nombreuses illustrations - Auteur : Catherine Livet pour la collection "Destins d'ancêtres" de Becklivet - Imprimerie Messages Sas. ISBN 9782493106018 - Dépôt légal mars 2022 - Sortie le 29 mars 2022
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Sources,
bibliographie : Archives départementales des Yvelines, Archives de Paris, Site "Mémoire des Hommes",
Mantes et son arrondissement - V. Bourselet et H. Clérisse, L'histoire de
l'Ile-de-France - Denis Lagarde, Base
Léonore, A nos poilus - Catherine Livet, Mes aïeux dans les Yvelines -
Catherine Livet, Historiques des régiments, Base documentaire des artilleurs
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