Charles Edouard Chalvet, un Parisien d’antan.

Rongée par l’ennui né de ces trop longues attentes entre deux obligations, installée dans un bien trop grand fauteuil de cuir fatigué, devant une tasse brulante de très mauvais café soluble trop sucré, je somnole... enfin, c’est l’impression que je donne... c’est l’artifice que j’emploie pour que mon entourage, pensant que j’ai besoin de repos, me laisse tranquille et que mon esprit, ivre de liberté, puisse s’échapper, s’élever, toujours plus haut... jusqu’à ce qu’il rencontre un autre esprit en goguette...
Bonjour Charles Edouard. Ne soyez pas surpris par ce que je vais vous dire, bien au contraire, aidez-moi à compléter votre histoire car voyez-vous, la transmission orale a des failles et il y a déjà bien longtemps que je n’ai pas entendu parler de vous... et pour cause, il n’y a plus personne aujourd’hui autour de moi qui puisse le faire.
Je crois me souvenir que lorsque l’on me parlait de vous on vous nommait Edouard alors, si vous le voulez bien, c’est ainsi que je vais vous appeler.
Vous ne saviez pas que nous avions rendez-vous... ne vous inquiétez pas, c’est normal, je n’ai prévenu personne de ma visite, je me suis décidée au dernier moment. Je suis Catherine Livet, la fille de René et c’est bien lui qui me parlait de vous...vous ne voyez toujours pas qui

Famille Chalvet
je suis mais regardez, il m’a confié cette photo, la seule que je possède qui vous représente, elle est aussi la dernière prise de vous, elle date de 1897, je ne sais pas pourquoi, une de vos filles ne figure pas sur ce cliché mais ce qui est important est que votre fils Emile est présent alors que les photos où il figure sont assez rares.
Oui, je sais parfaitement que mon père ne vous a pas connu mais, orphelin beaucoup trop tôt, il a été élevé par sa grand-mère, votre plus jeune enfant, Emilie Chalvet, qui lui a beaucoup parlé de vous ainsi que de son frère Emile... Non, elle ne lui parlait pas beaucoup de ses sœurs mais, c’est normal... mon père rencontrait tous les jours votre fille Louise et, très souvent, votre fille Marie ; il les considérait comme ses tantes et elles, réciproquement, le considéraient comme leur neveu... ils se connaissaient tous parfaitement.
 

 
 Lorsque vous venez au monde dans le 1er arrondissement ancien de Paris, le 03 décembre 1843, votre famille est déjà bien implantée dans la capitale depuis la toute fin du 18e ou au plus tard, au tout début du 19e siècle mais vos ancêtres étaient natifs du Cantal. En tous les cas, lorsque vous venez au monde, votre père habite toujours 5 rue de la Madeleine où vivent aussi ses sœurs et on peut dire que Sainte-Madeleine était alors le cœur de la vie de vos parents ; c’est dans cette église que votre père, François Joseph a épousé votre mère, Désirée Françoise Clavières, le 23 octobre 1841. Comme le sien avant lui, votre père était tailleur d’habits mais vous n’allez pas exercer ce métier ; il faut dire que François Joseph n’a pas eu l’occasion de vous l’enseigner puisqu’il décèdera le 26 septembre 1851, chez vous, rue de la Madeleine, âgé de seulement 34 ans.
C’est étrange Edouard, j’ai l’impression de bien vous connaître, parce que j’ai une photo et que mon père me parlait de vous, il me racontait en fait les souvenirs de sa grand-mère...  et aujourd’hui, en
Révolution de 1848 - Place du Palais Royal

écrivant ces quelques lignes à votre sujet, je prends conscience que vous avez connu -bien que très petit- la révolution de 1848... cela me paraît tellement incroyable et j’aimerai tant connaitre maintenant la pensée de vos parents à cette époque ainsi, bien entendu, que leur comportement... Je me demande si le petit enfant que vous étiez alors a compris ce qui se passait...
 
 
 
 
 
Rue du Chat qui Pêche - Paris 5e
Mais lors de l’épidémie de choléra de 1849, il est certain que vos parents ont été très actifs pour appliquer les consignes d’hygiène qui étaient données partout car, ne serait-ce que par votre âge, vous étiez particulièrement vulnérable... Il faut dire que Paris était particulièrement crasseux, complètement insalubre devrais-je dire... Les ruelles s’enchevêtraient les unes dans les autres, eaux usées et détritus stagnant partout... n’oublions pas que non seulement il n’y avait pas de tout-à-l’égout ni même de système d’assainissement mais qu’en plus, les logements étaient parfois, le plus souvent, à peine aérés et, le comble, l’eau courante n’existait pas...
 
La Bièvre lorsqu'elle était encore à l'air libre à Paris et ses industries
 Des tanneries, et autres industries nécessitant une très grande quantité d’eau, particulièrement polluantes, œuvraient le long de la Bièvre.
Vous avez survécu à cette épidémie de choléra et vos parents aussi mais je me pose maintenant une autre question à votre sujet... Jamais mon père ne m’a parlé d’un de vos frères ou d’une de vos sœurs... auriez-vous été fils unique ?
Ce 07 août 1852, vous êtes aux premières loges dans l’église Sainte-Madeleine car vous venez assister au second mariage de votre mère ; elle épouse Antoine Lafoy qui est né le 19 août 1813 à Druy dans la Nièvre, il est probable qu’il soit également veuf ; comme votre père, il exerce le métier de tailleur et, comme lors de son mariage avec votre père, votre mère est lingère mais bientôt, elle va exercer le métier de couturière et c’est grâce à ce second mariage que nous apprenons aussi que votre mère, Désirée Françoise Clavières est née le 30 juin 1820 à Paris.
Et voilà Edouard, c’est tout ce que je connais de votre enfance et il faudrait que nous puissions continuer de parler de vous mais regardez sur terre... Ma tasse de café soluble est restée intacte... mon chauffeur m’appelle doucement, il pense que je dors profondément... il faut vite que mon esprit regagne mon corps avant que quelqu’un ne s’inquiète... et puis, j’ai des horaires à respecter.
 
Catherine Livet
 
 
Merci pour vos lectures, n’hésitez pas à me laisser un commentaire. Je vous rappelle que ce texte est rédigé pour le #RDVAncestral de décembre 2018
 

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Sources /bibliographie
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  • archives de Paris
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