lundi 2 septembre 2019

Histoire locale

Limay dans les Yvelines
Photo de Louis de Faucigny

Bonjour mon lecteur,

J'espère que vous allez bien et que la rentrée des classes se déroule sans problème si vous êtes concernés.

Si vous ne le savez pas encore, sachez que j'ai ouvert un nouveau chantier : la série "Histoire locale". Dans un premier temps, je parle de Limay dans les Yvelines mais je vais également préparer quelques fiches sur d'autres villages. 
Pour ce qui concerne plus spécialement Limay, j'entre plus dans les détails et son histoire, ou plutôt la présentation que j'ai adoptée, servira de fil conducteur aux prochains ateliers d'écriture que je vais animer puisque l'on me fait l'honneur de me solliciter à nouveau... à moi donc de me renouveler. Le thème de ces ateliers sera donc de retrouver les grands ou petits événements locaux qui ont pu marquer la vie de nos ancêtres pour tenter de la mieux connaître.

Je vais par ailleurs préparer un petit article pour que vous puissiez, si vous le souhaitez, puiser quelques idées à ce sujet.

En attendant, juste en dessous, vous pouvez lire le texte que j'ai rédigé.
A très bientôt, merci d'être toujours présent à mes côtés,

Catherine Livet

Monastère des Célestins et armoiries modernes de Limay

Laissons derrière nous les bords de Seine, traversons précautionneusement les grandes artères et faufilons-nous vite dans les rues anciennes qui nous parlent de l’histoire de Limay dans les Yvelines. Nos regards se portent sur les hauteurs de la ville ou domine une grande bâtisse carrée qui est
Photo de Louis de Faucigny
nommée « château des Célestins »… N’est-il pas normal pour des moines portant un nom si évocateur de vouloir bâtir leur maison sur les hauteurs, au plus près de la voute céleste ? A dire vrai, d’autres raisons ont fait qu’il y a longtemps… très longtemps, une communauté religieuse s’est établie dans le village… Fermons les yeux, oublions ce château… concentrons-nous, tentons de nous souvenir de nos manuels scolaires… voilà, nous y sommes presque… des réminiscences d’histoire de France assaillent nos neurones… Les Valois, les Plantagenêts… la guerre de Cent ans… Charles V… le mythique chevalier Du Guesclin… Mais oui, nous y sommes totalement… en plein Moyen Age ! Et oui, il y avait des Anglais sur ce territoire dont nous parlons… Charles V dit « le Sage », est le premier fils de roi à porter le titre de Dauphin, il est le fils de Jean dit « le Bon » ; Charles II de Navarre qui sera appelé « le Mauvais » réclame, entre autres choses, le trône de France, il a de grandes possessions en Normandie, il s’allie pendant quelques années avec les Anglais dont le roi, Edouard III Plantagenêt, a aussi revendiqué le trône de France et c’est même, pour un temps, proclamé roi de France, ce dernier a pour fils Edouard qui restera dans l’histoire sous le nom de « Prince noir » et qui infligera une cruelle défaite aux Français, en 1356, à la bataille de Poitiers où il fait prisonnier le roi Jean le Bon. Le Dauphin de France devient alors Régent du royaume puis Roi au décès de son père en 1364. Charles de Navarre dit « le Mauvais », cousin du roi de France, et les Anglais tiennent la Vallée de la Seine, les habitants de Limay se sont-ils habitués à croiser ses étrangers qui ont investi la place de Mante et qui occupent Limay, empêchant les bateaux de ravitailler la capitale qui crie famine…. Les Parisiens grondent… il faut trouver une solution…   Charles V
charge Bertrand Du Guesclin de reprendre la vallée. Le chevalier fait le siège de Rolleboise également aux
Bataille de Coquerel – mai 1364 – Chanson de Du Guesclin – Jean Cuvelier
mains des Anglais mais il s’avère que la prise de cette forteresse ne va pas se faire en un jour alors, dans le même temps, il est décidé de prendre la
ville de Mante et pour se faire, un stratagème que l’on attribue parfois au capitaine Guillaume de Launoy est élaboré. Une trentaine de soldats triés sur le volet s’infiltrent dans Mante sous des prétextes divers et prennent bien  soin, pour ne pas attirer l’attention, de faire croire qu’ils ne se connaissent pas. Une vingtaine de soldats revêtent des habits de vignerons sous lesquels ils cachent les meilleures armes qu’il soit possible d’avoir alors. Ils se présentent à la porte par petits groupes et demandent à travailler aux vignes pour gagner leur journée… Cette demande fort courante dans cette région couverte de treilles est reçue sans soulever un seul soupçon et la petite porte leur est ouverte… Promptement, ils s’emparent d’une charrette qui sortait de la ville et la jette en travers du pont pour empêcher la fermeture de la porte et aux cris de « Launoy ! Launoy ! » ameutent les hommes de Du Guesclin, tant ceux déjà en place que ceux qui attendent leur heure tapis dans les environs… Furieusement, comme un seul homme, ils se jettent alors dans la place… et comme les habitants sont encore pratiquement tous profondément endormis, la défense est médiocre et, pour tenter d’échapper aux Français, la population n’a que la solution de se réfugier dans l’église… Mante est prise et Meulan le sera dans quelques jours…
Cette prise de Mante n’est pas racontée de la même façon par Jean Froissart, pourtant chroniqueur célèbre du 14e siècle, qui parle aussi d’une ruse mais dit que le Maréchal Boucicaut, à cheval et en armes et accompagné de ses hommes, aurait demandé l’ouverture des portes en prétendant être sauvagement poursuivi…  
Laissons là ces querelles et profitons du calme revenu à Limay car la paix ne va pas durer et les Anglais reviendront, dans quelques temps, arpenter le village… 
En attendant, regardons encore les hauteurs sur lesquelles se trouve notre château des Célestins… Avant qu’il ne soit construit il y avait déjà quelques habitants qui vivaient dans une saine solitude près de la source

Lettrine de la charte de la fondation du monastère des Célestins de Limay
 
vitale qui s’appelle la Carrelée qui alimenta Mante incapable, repliée derrière ses murs, d’être autonome pour ses besoins primordiaux.  Cette présence humaine est attestée dès l’an 1363 et confortée en 1367 par l’érection d’une chapelle en l’honneur de Sainte-Christine. Charles V, désireux d’installer des moines Célestins dans la région, en acquit les droits ainsi que ceux sur ses dépendances ; Il dédie le monastère à la Sainte Trinité qui est dès lors symbolisée par trois fleurs de lys indissociables.
 
La charte qui régit la fondation du monastère des Célestins à Limay revêt une importance particulière puisqu’elle précise l’emploi des trois fleurs de lys qui deviendront le symbole officiel du royaume de France… Cette charte est expédiée en février 1376 et est cachetée du sceau ancien ; l’enregistrement de cette charte est authentifiée par un sceau à trois fleurs de lys mais il faut garder à l’esprit que Charles V utilisait déjà un sceau ordonné à trois fleurs de lys dès 1375 comme il est attesté par une charte datée du 07 décembre de cette année.
A Limay, nous devons donc un troisième élément de notre écu à Charles V ou aux Célestins, comme il plaira à chacun… et même un quatrième puisque soutenant l’écu se trouve une croix pattée sur laquelle s’enlace la lettre S. Si l’on voit bien la référence directe au monastère des Célestins avec l’utilisation de la croix pattée, le S reste un peu mystérieux et bien compliqué car il représenterait l’initiale de la ville de Sulmona qui se trouve dans les Abruzzes, en Italie, berceau de l’ordre des Célestins où Pierre de Morrone, futur éphémère pape Célestin V, a fondé l’abbaye du Saint-Esprit… Si l’on retrouve la croix pattée sur l’écu de Porcheville, en référence aux possessions porchevilloises de nos Célestins, on ne retrouve nulle part ce S.

Charles V dit le Sage se serait-il arrêté à Limay juste pour nous offrir un monastère richement doté et un bouquet de lys ?
A suivre

2 commentaires:

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