oleur de poules… Mais oui, mon Père, de votre propre aveu ! C’était
la guerre, vous aviez été expédié travailler pour la Deutsch Reichsbahn à Ulm,
en Allemagne… C’était le S.T.O et l’exil… c’était la peur et les privations, c'était la faim qui vous tenaillait…
Ce matin là, en 1944 ou 1945, c’était votre tour d’aller
chercher à la cantine la cafetière pour le petit-déjeuner des copains de la
carrée des gueulards… Comme à chaque fois que vous vous rendiez au réfectoire
depuis le baraquement où vous étiez sommairement logé, vous êtes passé devant le quartier des tziganes et, à votre
retour à quelques centimètres de vous, une maigrelette poule échappée de ce
camp errait, seule et perdue… Alors, sans réfléchir, vous avez doucement déposé
votre cafetière au sol, vous avez ôté votre veste… attrapé et estourbi le
volatile… et vous êtes arrivé dans vos quartiers… Tout heureux, vous avez
montré votre larcin à vos malheureux compagnons ébahis… Mais ce n’est pas le
tout… qu’alliez-vous faire ensuite ?
Vous avez caché la poule dans une jambe d’un pantalon qui
pendait à un clou puis, en revenant de la cantine, vous vous êtes fait porter
pâle… mais au lieu de rester tranquillement dans vos quartiers, vous avez fait
le tour des baraquements pour trouver un minimum de matériel pour faire cuire
la volaille… Vous avez réussi à vous faire prêter une mauvaise marmite chez les
Italiens et divers ustensiles chez les
uns et les autres…
Et puis il a fallu attendre le soir… le garde allemand,
pourtant accompagné par son chien berger de même nationalité, est venu pour
l’extinction des feux… le chien n’a rien senti, le garde n’a rien vu… même pas
la petite flaque formée par le sang que la poule avait perdu durant ses longues
heures d’attente… Et puis il a fallu tirer les lits et extraire de sous le
plancher tout le matériel nécessaire à la préparation de ce souper
exceptionnel… et puis il a fallut cacher la lueur inhabituelle que le fourneau
improvisé projetait… et puis il a fallu se débarrasser des plumes qui volaient
partout dans le dortoir… et puis il a fallu trouver le moyen de dissiper la
fumée et l’odeur qui avaient envahi tous le baraquement… et puis, il a bien
fallu reconnaître qu’une maigre poule au pot pour une douzaine de convives ne
comblait pas la faim qui tenaillait les estomacs depuis si longtemps maintenant…
mais qu’importe en fait puisque pendant toute cette journée, vous avez été
heureux !
Lorsque
vous m’avez raconté cette histoire mon Père vous vous êtes souvenu de l’autre
poulet, bien dodu celui-là…
Il faut revenir en arrière, à Paris en 1942, vous
aviez été détaché par la SNCF dans une filiale chargée de livrer des colis chez
les particuliers… Tous les paquets
étaient chargés sur un grand diable… le travail n'était pas désagréable et tout se passait le mieux du monde sauf
qu’un jour, un colis indéterminé, malmené ou mal ficelé a laissé échapper son
contenu… un poulet tout frais, tout replet s'est ainsi offert à votre vue… Vous n’avez jamais cherché à savoir
où vous deviez le livrer… De toutes les façons, vous ne pouviez pas aller
frapper à toutes les portes pour savoir lequel de vos clients n’avait pas reçu
le poulet qu’il attendait… vous aurait-on dit la vérité ? Vous avez donc
subtilisé la volaille… vous vous en êtes ensuite voulu car, non seulement elle
ne vous appartenait pas mais de plus
vous avez également pensé que peut-être la personne à qui elle était destinée avait
encore plus faim que vous…
Car oui, il y avait des manques à Paris sous
l’occupation… malgré le jardinage intensif sur la moindre parcelle disponible
comme les champs de poireaux ou de haricots dans les jardins du Louvre sous l'égide du Secours National, et l’élevage
de poules et de lapins dans les caves et sur les balcons…
Il existe des photos extraordinaires où l'on peut voir des Parisiens avec une oie, des canards et même des cochons et des chèvres dans les caves, les cours...
Les tickets de rationnement vont exister bien après la fin
de la guerre et il y aura donc encore des pénuries
avec des files d’attente
interminables comme vous les aviez connues avant votre départ forcé pour l’Allemagne.
En pensant à tout ce qui vous a manqué durant cette
bien douloureuse époque, je me demande ce que pouvait bien être le genre des
marchandises que vous avez été obligé de manipuler lorsque, durant votre séjour
forcé à la Deutsche Reichsbahn d’Ulm, vous étiez préposé au déchargement des
wagons
J'ai écrit la vie de mon père durant l'affreuse époque qui lui a volé sa jeunesse puisqu'il a été "requis" du S.T.O :
Un p'tit gars du S.T.O
Dans Paris occupé, la vie de René, né en 1922, est compliquée. Sa
grand-mère, qui l’a élevé, vient de décéder. Il doit quitter
précipitamment son emploi pour échapper à une première réquisition
et se pense à l’abri après avoir été embauché à la S.N.C.F. Mais les
ennuis vont commencer et s’éloigner de la gare de triage où il
officiait va devenir une nécessité.
L’étau va se resserrer, il sera expédié en Allemagne au titre du Service du Travail Obligatoire.
À la gare d’Ulm, sur le Danube, en Allemagne, où il doit travailler,
les règles ne sont pas respectées, les requis sont maltraités. Infrastructure
de
la plus haute importance, la gare va être bombardée et ruinée par
les alliés et René va être blessé. Le 24 avril 1945, à 11 heures, il se
trouve face à des soldats américains, il se croit libéré,
mais rien n’est encore joué et le rapatriement ne va pas être aisé.
Enfin rentré, rien n’est terminé et malgré le temps, les souvenirs ne seront jamais effacés.
Livre 16 x 24 cm - Dos carré collé - 80 pages - Nombreuses illustrations inédites en couleurs - Auteur
: Catherine Livet pour la collection "Destins d'Ancêtres" de Becklivet - Imprimerie Messages Sas - ISBN 978-2-493106-03-2 - Dépôt légal août 2022 - Sortie le 12 septembre 2022 - 18 € TTC
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Challenge AZ 2019 - Généalogie - Biographie René Livet
Quand un poulet en rappelle un autre... Ce sont des souvenirs très vivants que ceux-ci, et un bien joli billet.
RépondreSupprimerMerci Christelle
SupprimerRigolote anecdote, la faim justifie les moyens !
RépondreSupprimerMerci Anonyme
SupprimerUn épisode plus léger même si le décor reste très sombre ! Il faut penser à sourire même - et surtout - dans les situations les pires :)
RépondreSupprimerMais oui, et ces petites histoires illustrent bien l'époque. Merci Béatrice pour toutes vos lectures.
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