En ce début de septembre 1939, la
France -alliée avec son meilleur ennemi historique la Grande-Bretagne- vient de
déclarer la guerre à l’Allemagne qui n’a rien déclaré du tout et qui est déjà
en guerre.
Mais vous mon Père, vous êtes
trop jeune pour être soldat, ce qui n’est pas le cas de votre oncle Emile qui
est né le 31 juillet 1907 dans notre très cher Paris 14
e où, malgré
les troubles de l’époque, il a épousé Louise Marie Blanche Noval, le 06 mai
1939 et, soyez rassuré mon
Père, encore aujourd’hui, je me souviens très bien de votre oncle Emile et de
son épouse Blanche puisque tel était son prénom usuel mais, je dois dire que ce
n’est pas le cas pour leur fille Monique -qui pourtant sera la marraine de mon
frère- et de son époux ainsi que de leur fille dont le souvenir est plus flou…
Mais revenons à la seconde guerre mondiale car
Emile, âgé de 31 ans est donc promu défenseur de la France et ceci va
considérablement changer également le cours de votre vie car jusqu’à présent,
vous étiez resté l’enfant de la famille, celui dont la naissance avait tant
charmé mais voilà, les choses ont bien évolué et vous êtes maintenant, depuis
que votre oncle est sous les drapeaux, l’homme de
la famille. Votre tante par alliance est enceinte et doit prendre soin de
son fils, Roger, né d’une première union et qui vit avec vous, dans l’immeuble
des Livet, dans l’appartement que vous occupiez avec votre mère lorsque vous
étiez un tout jeune enfant et qu’un jour prochain vous allez regagner et où je
vais naître… ou presque. Vous devez seconder votre chère Maman Emilie,
qui souffre en silence de sa maladie et peut être plus encore des deux
interventions chirurgicales qu’elle a du subir et dont la dernière opération
remonte pourtant à 1924, pour tenir la loge de l’immeuble où elle est concierge depuis de nombreuses
années… tout ceci, vous le faites en allant travailler car vous êtes employé de
l’imprimerie Desfossés mais en ces temps troublés, rien n’est plus pareil et,
le 03 juin 1940, contraint et forcé, vous devez quitter votre travail… Les
rédactions des quotidiens sont déjà exilées en zone libre, des Parisiens sont
partis à la campagne…
Il faut dire que l’impensable est arrivé et Paris
est sous le joug allemand mais vous ne m’avez que très peu parlé de l’entrée
des occupants… sans doute parce que vous n’aviez pas eu de contact direct avec
l’envahisseur à cette époque contrairement à ce qui va se passer plus tard dans
votre vie… Ne seriez-vous pas allé, même une fois, assister à la parade de la relève quotidienne sur les
Champs-Elysées ?
Ceci dit, vous n’avez même pas 18 ans et vous êtes
tellement préoccupé… Emilie va très mal, vous devez l’obliger à aller consulter
à l’hôpital car elle ne veut plus voir les médecins qui, elle en est persuadée,
ne peuvent rien ; elle ne veut plus prendre les médicaments qui, dit-elle,
l’empoisonnent plus qu’ils ne la soignent ; elle veut rester chez elle et
y mourir, entourée de sa famille et de ses amis et voisins… Car en plus de la
maladie, pour la première fois de sa vie, la courageuse et bienfaisante Emilie,
est submergée par les événements et, elle qui a connu de trop près la Grande
Guerre, ne peut pas supporter l’occupation de ceux qu’elle continue à appeler
les Boches.
Au milieu du mois de juin 1941,
vous appelez au secours car en rentrant de l’un des petits boulots que vous
enchaînez pour gagner tant bien que mal votre vie, vous découvrez Emilie dans
un état semi-comateux… Tous les voisins, tous vos amis, se précipitent… on lui
tapotent les joues, on lui fait boire un peu d’eau, on lui défait son corsage… elle est conduite à l’hôpital
Cochin ou elle décède le 21 juin de cette année 1941.
Emilie Chalvet veuve Noé Livet
n’a que 59 ans lorsqu’elle quitte cette terre, son corps est placé dans un
cercueil de chêne ordinaire, elle sera conduite par ses proches jusqu’au
cimetière de Bagneux, où sont déjà enterrés sa fille et son époux, elle est
inhumée dans la tombe n° 6, ligne 13 de la division 95 et la concession est
payée pour 5 ans, elle sera renouvelée plus tard par son fils Emile.
Vous
n’aurez pas réellement le temps de pleurer votre regrettée Maman Emilie car
vous allez rapidement devoir régler quelques problèmes très matériels. Depuis
le décès de votre mère en 1927, vous êtes allé vivre chez vos grands-parents, à
la loge de l’immeuble mais au décès de votre grand-mère, Maman Emilie, vous
devez quitter rapidement les lieux car l’immeuble ne peut pas vivre sans concierge
et vous n’avez aucune vocation à remplir ce rôle. La petite famille de votre
oncle Emile Livet, dont la fille, votre cousine germaine Monique est née en
1940, va déménager dans un appartement un
peu plus grand au 37 de la même rue… il faut passer par le 1er
étage du 39 rue Daguerre pour atteindre ce logement… Ah Paris ! Et, vous
allez pouvoir occuper, seul, le petit appartement du 3e étage, celui
là même où vous avez passé vos premières années et ou je vais grandir… Mais
cela ne va pas sans peine car, vous êtes mineur et il va vous falloir faire
des pieds et des mains pour obtenir, entre autres choses, un contrat avec la compagnie parisienne de distribution d’électricité.
Au 39 de notre rue Daguerre, habite également votre
cousine Georgette Sirejean qui décèdera bien trop jeune, avant même ma naissance
mais, j’ai bien retenu vos paroles et je me souviens que le molosse qu’elle promenait partout dans ses jeunes années,
un bouledogue « primé », répondait au nom de Pépère ; elle aussi
doit enchaîner les petits boulots pour vivre. Je ne sais pas où est sa sœur Henriette, notre fameuse Yéyette,
à cette époque ; leur frère Georges est décédé en 1936, prématurément
également même s'il avait été très blessé pendant la Grande Guerre, leur
sœur Jeannette habite à Argenteuil qui se trouve aujourd'hui dans le Val d’Oise.
En cette période
compliquée, les sœurs se voient beaucoup moins que d’ordinaire mais elles arrivent
à s’écrire et les nouvelles arrivent plutôt assez vite… Il y en a heureusement
de bonnes comme l’envoi de la photo du petit dernier mais il y en a que vous préféreriez ne pas recevoir car Jeannette va bientôt se retrouver dans une
situation inimaginable, surtout qu'on ne peut strictement rien faire pour lui venir en aide, et va vivre un drame inhumain dont son mari sera la
première
victime : A votre grande stupéfaction vous apprenez que l’époux de Jeannette a été arrêté à leur domicile et
conduit à Compiègne dans l’Oise où il est interné dans l’immense camp appelé
Royallieu… Il faut dire que le mari de celle qui deviendra ma marraine cumule
les critères qu’il ne fallait surtout pas posséder en cette période de tous les dangers… Il
est resté dans les annales de certains syndicats pour avoir été au cœur -sinon
le prétexte, voir le déclencheur- des grandes grèves de 1937/1938 au sein de
l’entreprise Goodrich où il était testeur-dépanneur (des lignes de téléphone)…
Quelle histoire !
Enfin bref, Mordouch, puisque tel est son prénom, est communiste et russe… il cumule donc déjà les sources d'ennuis avec l'ennemi et, malheureusement pour lui, les Allemands vont très vite lui trouver un troisième
défaut…
Les souvenirs arrivent dans un
ordre bien étrange mon Père car à l’instant
où j’évoque cette période particulièrement difficile je ne peux
m’empêcher de penser à votre caractère heureux et enjoué et à votre sens fort développé de l’humour.
Vers H
J'ai écrit la vie de mon père durant l'affreuse époque qui lui a volé sa jeunesse puisqu'il a été "requis" du S.T.O :
Un p'tit gars du S.T.O
Dans Paris occupé, la vie de René, né en 1922, est compliquée. Sa
grand-mère, qui l’a élevé, vient de décéder. Il doit quitter
précipitamment son emploi pour échapper à une première réquisition
et se pense à l’abri après avoir été embauché à la S.N.C.F. Mais les
ennuis vont commencer et s’éloigner de la gare de triage où il
officiait va devenir une nécessité.
L’étau va se resserrer, il sera expédié en Allemagne au titre du Service du Travail Obligatoire.
À la gare d’Ulm, sur le Danube, en Allemagne, où il doit travailler,
les règles ne sont pas respectées, les requis sont maltraités. Infrastructure
de
la plus haute importance, la gare va être bombardée et ruinée par
les alliés et René va être blessé. Le 24 avril 1945, à 11 heures, il se
trouve face à des soldats américains, il se croit libéré,
mais rien n’est encore joué et le rapatriement ne va pas être aisé.
Enfin rentré, rien n’est terminé et malgré le temps, les souvenirs ne seront jamais effacés.
Livre 16 x 24 cm - Dos carré collé - 80 pages - Nombreuses illustrations inédites en couleurs - Auteur
: Catherine Livet pour la collection "Destins d'Ancêtres" de Becklivet - Imprimerie Messages Sas - ISBN 978-2-493106-03-2 - Dépôt légal août 2022 - Sortie le 12 septembre 2022 - 18 € TTC
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Que de souvenirs en effet ! Hâte de connaître la suite, même si je crains qu'elle ne soit pas joyeuse...
RépondreSupprimerMerci Christelle. Il ne faut pas que le souvenirs se perdent, tristes ou joyeux...
SupprimerTriste période ...
RépondreSupprimerOui alors !
SupprimerQuelle triste période pour ton papa. Les mauvaises nouvelles s'enchainent... Merci encore de nous faire partager la biographie de ton papa. C'est touchant.
RépondreSupprimerMerci Sébastien. Bien triste période en effet
RépondreSupprimerSale période... mais toujours très intéressant de suivre le parcours de votre père à travers la grande Histoire. Merci de nous faire partager tout cela.
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