Il fait très chaud en ce milieu de mois d'août et mon corps se sent bien las, laissant toute initiative à mon esprit qui en profite pour partir à la rencontre de celui d'un autre, qui le hante depuis quelque temps, parce que son histoire n'est pas très claire.
Vous êtes mon grand-oncle, le frère de mon grand-père Marcel Beckrich. Une chose est sûre, vous êtes le fils de Ida Rachel Ernestine Charles, qui est aussi la mère de mon grand-père. Vous êtes né le 04 septembre 1899, dans le 10ᵉ arrondissement de Paris, à l'hôpital Saint-Louis.
Bon, peu importe ! Vous êtes bien mon grand-oncle, mais la poisse qui a toujours collé à la peau de Gustave va finir par engluer toute la famille : vous, votre frère Maurice René né en 1902, Marcel, qui deviendra mon grand-père, Suzanne, votre sœur, et Eugène, né en 1907. Vous vivez à Saint-Denis. Votre père est flanellier et votre mère corsetière.
Les premières années de mariage de vos parents sont aussi des années de deuil. Le père de Gustave, décède en 1902, ainsi que votre petit-frère, Maurice Jacques ; en 1906, ce sera la mère de Gustave qui quittera ce triste monde et puis, tout doucement, le destin va se mettre en chemin. Pourtant, tout paraît enfin sourire à Gustave et à sa famille puisque vous vous installez dans un appartement neuf, disposant de fenêtres et de tout le confort possible, 7 place du marché, toujours à Saint-Denis.
Saurai-je un jour ce qui s'est réellement passé ? Ce qui est certain, est que votre père est, à son tour, hospitalisé, mais très loin de votre lieu de résidence, à l'hôpital Lariboisière.
Peut-être, connaissez-vous les réelles raisons de cette funèbre situation, car je dois me contenter de ce que votre frère, mon grand-père, Marcel, a raconté à sa fille, ma mère, Denise, lorsqu'elle était jeune-fille. Marcel est né le 04 août 1903, dans des circonstances très particulières, sur le lieu de travail de votre mère. Il lui a également parlé de sa sœur, dont le prénom était devenu Jeanne lorsque son histoire est venue jusqu'à moi, mais jamais il n'a évoqué votre petit frère et, ce qui est tout de même plus étonnant, il n'a jamais parlé de vous, son frère aîné.
Les faits dramatiques que nous évoquons se sont déroulés fin 1909, début 1910 ; Marcel était donc bien jeune ; peut-on vraiment prendre ses souvenirs pour argent comptant ? De plus, et pour cause, puisque je ne l'ai pour ainsi dire pas connu, ce n'est pas lui qui m'a raconté l'histoire, mais ma mère... Il y a forcément une perte de l'information, une interprétation...
Marcel disait qu'après le décès de votre mère, votre père se serait suicidé en se jetant par la fenêtre d'un bâtiment situé rue Brézin, dans le 14ᵉ arrondissement parisien...
Une chose est sûre, votre père n'est pas décédé des suites de cette défenestration... mais, comment est-il possible que Marcel ait pu oublier les affreux événements qui vont suivre cette tentative désespérée ?
Lors de cette tragédie, vous avez déjà plus de dix ans et votre père vous place chez des parents en province... Je n'ai jamais trouvé qui vous a recueilli. Le plus jeune de vos frères, Eugène Louis, né le 16 avril 1907, est mis en nourrice et mon grand-père et votre sœur sont pris en charge par l'assistance publique dès janvier 1910. Votre père sort de l'hôpital Lariboisière le 20 février 1910... avec ses enfants, Marcel et Suzanne, qui lui ont été rendus dans la foulée... Gustave n'a plus de travail, plus d'économie et n'a pas payé son loyer... Gustave rédige une lettre destinée à un magistrat en lui demandant qu'il fasse tout le nécessaire pour que l'on s'occupe bien de ses enfants et, le 23 février 1910, soit seulement trois jours après la fin de son hospitalisation, à votre domicile du 7 place du marché, il se tire une balle de pistolet — il n'était pas rare d'en posséder un à cette époque — dans la tempe droite... devant Marcel et Suzanne !
Je vous perds de vue jusqu'à la fin de l'année 1917 où je vous retrouve enfin, le 03 décembre, en Dordogne, à la mairie de Bergerac... vous êtes venu vous engager pour quatre ans au 30ᵉ régiment d'infanterie... Je ne vais plus vous quitter... sauf à l'instant, où il me faut rejoindre la terre pour transcrire notre #RDVAncestral et le partager avec qui voudra le lire. Je vais revenir, le mois prochain, et j'espère que vous approuverez ma restitution de votre histoire.
Catherine Livet.
Ce texte a été rédigé dans le cadre du #RDVAncestral
Eugène Bousquet, beau-frère de Gustave, scandale à l'église neuve de Saint-Denis
"de la généalogie à l'écriture"
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FNAC
(Pour la version numérique de mes livres)
Pour me joindre :
Ah, ces histoires de familles, les dits, les non-dits, les secrets de famille... Merci, pour ce nouveau RDVAncestral
RépondreSupprimerun bien triste rendez-vous qui contraste avec l'esprit farniente de l'été
RépondreSupprimerHa oui ! Tu as raison ! Je n' avais pas pensé à ça. Merci Dominique pour ta lecture.
SupprimerMerci beaucoup Alain pour votre lecture et votre commentaire. Je pense vraiment que les souvenirs doivent toujours être vérifiés car ils sont souvent déformés lors de la transmission, mais il ne faut jamais les négliger parce qu'il semble qu'il y ait toujours une grande part de vérité derrière.
RépondreSupprimerrendez-vous bien triste !
RépondreSupprimerOh oui ! Toute cette branche a eu une vie très triste. Merci Christiane pour ta lecture et ton commentaire.
SupprimerTout cela cache bien de la misère !
RépondreSupprimerOh que oui ! Merci pour la lecture et le commentaire !
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